Le nouveau référent national laïcité de la Fédération française de lutte et discipline associées (FFLDA) présente les contours de l’action fédérale dans un domaine où les pouvoirs publics enjoignent aux instances sportives d’agir plus que jamais avec célérité et fermeté. Exemple d’une Fédération qui a pris ses responsabilités en la matière.


Le Gouvernement impose de sensibiliser les fédérations sportives, leurs organes déconcentrés et les encadrants sur ces sujets afin qu’ils soient en capacité de prévenir, repérer et traiter les comportements déviants, communautaristes et autres. Comment la FFLDA s’y prend-elle ? 

Nous avons l’ambition d’aller beaucoup plus loin. J’ai élaboré un vade-mecum qui est, en quelque sorte, un modus operandi destiné à accompagner les organisateurs, les officiels, les bénévoles, les présidents de comité régional, voire départemental, etc., pour permettre le respect de la laïcité dans le cadre des compétitions officielles. À cette fin, il impératif que tous soient en capacité d’intervenir quand un problème se présente, mais également qu’ils sachent quoi faire exactement et qu’ils connaissent les obligations qui s’imposent à eux. C’est pourquoi nous allons instaurer des formations dédiées à leur intention.

Qu’allez-vous également mettre en place ?

Nous allons formaliser des supports de communication, en particulier visuels mais pas uniquement, pour rappeler les obligations des uns et des autres. J’ai également déjà rédigé un texte assez court qui est une sorte de charte. Elle est lue avant chaque compétition officielle (lire encadré ci-après). Elle rappelle aux athlètes et à leurs équipes les règles inhérentes au respect de la laïcité et aux valeurs de la République dans les enceintes sportives, ainsi qu’au fair-play et au respect des règles et de l’adversaire. En effet, il est essentiel d’impliquer tout le monde dans cette démarche car nous sommes tous sur le même bateau. Il n’est pas envisageable que chacun impose son interprétation ou sa vision des textes, d’autant qu’en France, peu de gens mesurent correctement ce que recouvre la laïcité, laquelle bannit le prosélytisme mais ne consiste pas, pour autant, à lutter contre la religion ni à interdire la pratique du culte. De même, tous les sujets, en particulier de géopolitique ou concernant les conflits internationaux, n’ont pas systématiquement à voir avec la laïcité. Sachant, en outre, que le principe de neutralité ne s’applique qu’aux personnes qui participent, à titre divers, à la compétition (athlètes, officiels, etc.). Il concerne aussi bien l’interdiction du port des signes ostentatoires que de prier dans les vestiaires, etc. Toujours est-il qu’avant d’imposer, il faut expliquer.

« Nous ne sommes pas dans une démarche de conflit »

Que se passera-t-il pour les contrevenants ?

Si l’incident concerne un compétiteur ou une compétitrice qui porte un signe religieux ostentatoire, il ou elle sera rappelé(e) à ses devoirs par les organisateurs ou le référent laïcité présent sur place, qu’il s’agisse de celui du club ou du comité régional. Si l’intéressé(e) refuse de se soumettre au règlement, il / elle est susceptible d’être disqualifié(e) et de faire l’objet d’un signalement pouvant déboucher sur des sanctions disciplinaires. Quant au trouble à l’ordre public, il ne concerne que le public qui, s’il impose son idéologie, par exemple pendant une compétition, pourra être rappelé à ses obligations de bien se comporter. Mais il convient de rappeler que l’obligation de neutralité ne concerne pas le public qui, lui, est libre de manifester ses convictions religieuses comme il le veut, sauf, justement, s’il trouble l’ordre public. Quant aux compétiteurs, ils sont soumis à la neutralité, au même titre que les agents publics, parce qu’ils représentent, par délégation de service, la Fédération et le ministère des Sports. Toujours est-il que le but est de ne pas laisser une situation délétère se poursuivre quelle qu’elle soit. Sachant qu’en pareil cas, nous demanderons des comptes aux différents acteurs concernés pour déterminer comment on en est arrivé là. Néanmoins, j’insiste sur le fait que nous sommes avant tout dans un travail pédagogique sur le long terme, afin que le fait religieux ne s’invite plus dans nos compétitions sportives. Nous ne sommes pas dans une démarche de conflit.

Pour le reste, quel est le contour de vos missions ?

En tant que référent national laïcité, je suis habilité à intervenir à l’échelon national. Par exemple, à propos de situations qui me seront rapportées, à des fins de conseil ou autre, par les organisateurs, les dirigeants de club, les encadrants et les référents régionaux laïcité. Ces derniers seront, en effet, les interlocuteurs désignés, chargés, en particulier, de collecter les difficultés rencontrées au sein de leur région, de me les faire remonter au niveau fédéral afin que nous puissions les analyser et apporter des solutions dans les meilleurs délais. Je suis aussi là pour être un soutien technique à l’organisation et au bon déroulement des manifestations sportives. Enfin, j’assume également une mission de médiation et, je dirais, d’apaisement. Notre rôle est de faire comprendre que certaines pratiques s’opposent au principe républicain de neutralité. D’où, là encore, l’intérêt d’être dans la pédagogie avec un objectif d’acculturation à la législation française.

Propos recueillis par Alexandre Terrini

Le texte prononcé avant chaque compétition

Chers participants, chers accompagnateurs, chers spectateurs,

Au nom de la Fédération française de lutte et disciplines associées, bienvenue à cet événement sportif (championnat de France de lutte, tournoi national ranking,…), un moment d’engagement, de dépassement de soi et de respect des valeurs sportives que nous portons fièrement.

Ce tournoi, organisé dans un cadre républicain, incarne les principes essentiels de fraternité, d’égalité et de respect de la diversité. La laïcité, pilier fondamental de notre société, assure à chacun la liberté de croire ou de ne pas croire, dans un cadre neutre et inclusif où tous ont leur place. Veillons ensemble à préserver cet esprit en adoptant une attitude respectueuse et exemplaire, sans signes ostentatoires d’appartenance religieuse.

La lutte est une école de vie. Elle nous enseigne l’esprit d’équipe, la discipline, le respect des règles et de l’adversaire, ainsi que la valeur de l’effort. Aujourd’hui, faisons de cette compétition une célébration du fair-play et du partage, où chaque athlète, chaque spectateur et chaque accompagnateur contribuent à cet esprit d’unité.

La Fédération française de lutte et disciplines associées vous remercie pour votre engagement et votre exemplarité. Ensemble, faisons rayonner les valeurs de notre sport.

Et maintenant, place à la lutte !